La jurisprudence en matière de prescription des actions en garantie contre les vices cachés vient de connaître une évolution notable avec un arrêt de la chambre mixte de la Cour de cassation en date du 21 juillet 2023 (n° 20-10763). Cet arrêt apporte une clarification bienvenue après des années de débats jurisprudentiels et doctrinaux. Les praticiens du droit et les justiciables se trouvaient souvent dans une situation d’incertitude quant au régime applicable, notamment en raison de la divergence d’interprétations entre les chambres civiles de la Cour de cassation.
Le cas d’espèce concernait un litige résultant de désordres survenus dans une toiture, suite à l’utilisation de plaques de fibrociment fournies et installées dans le cadre d’une opération de construction. La complexité du litige était accentuée par la chaîne contractuelle impliquant le maître de l’ouvrage, le constructeur, le fournisseur et le fabricant des matériaux.
Point de départ de la prescription et application du droit antérieur
Traditionnellement, l’interprétation dominante faisait courir le délai de prescription à partir de la date de livraison des matériaux, conformément à l’article L110-4 du Code de commerce, avec un délai initialement fixé à dix ans puis réduit à cinq ans suite à la réforme de 2008. Cette approche avait pour effet de limiter la fenêtre temporelle disponible pour agir en justice, enfermant le délai spécial de l’action en garantie des vices cachés dans ce délai de prescription de droit commun.
Nouvelles règles établies par la Cour de cassation
La Cour de cassation, dans son arrêt de juillet 2023, opère un revirement doctrinal en affirmant que le point de départ du délai de prescription de l’article L110-4 du Code de commerce doit s’aligner sur le droit commun, à savoir l’article 2224 du Code civil. Désormais, le délai ne court plus à compter de la livraison mais à partir du moment où le titulaire du droit découvre ou aurait dû découvrir les faits lui permettant d’agir. Cette décision marque un alignement sur l’évolution jurisprudentielle récente et prend en compte les critiques formulées quant à l’ancien régime.
Par ailleurs, la Cour précise que le délai spécial de l’action en garantie des vices cachés n’est plus à considérer comme enfermé dans le délai de prescription de droit commun. Cela signifie que l’action en garantie doit être intentée dans les deux ans suivant la découverte du vice, sans pouvoir excéder un délai butoir de vingt ans à compter de la naissance du droit.
Implications pratiques et recommandations
Cette jurisprudence est favorable aux maîtres d’ouvrage et aux constructeurs, qui bénéficient d’une extension significative de leur délai d’action. Cependant, elle soulève des défis pour les fabricants et les vendeurs, notamment en termes de conservation des documents et de traçabilité des produits.
En conséquence, il est vivement recommandé aux acteurs concernés de revoir leurs pratiques internes de conservation des documents et de s’assurer de la traçabilité des produits afin de pouvoir répondre efficacement à d’éventuelles actions en garantie.
Conclusion
La clarification apportée par la Cour de cassation sur les règles de prescription en matière de vices cachés constitue une évolution juridique majeure. Elle invite les professionnels du droit et les acteurs du secteur de la construction à adapter leurs stratégies et leurs pratiques. Notre cabinet d’avocats reste à votre disposition pour vous accompagner dans l’analyse de vos dossiers et la mise en œuvre des meilleures stratégies juridiques adaptées à cette nouvelle donne.
N’hésitez pas à nous contacter pour toute consultation ou assistance juridique relative à cette thématique.
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